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Les conservateurs néerlandais, artisans de l’ascension de l’extrême droite

Ce sera, si les négociations toujours en cours aboutissent, une première en Europe du Nord : les Pays-Bas devraient bientôt être gouvernés par une formation d’extrême droite, le Parti populaire pour la liberté (PVV), du populiste Geert Wilders, appuyé par trois partis de droite et du centre droit qui se sont alliés à lui pour négocier un accord de gouvernement largement inspiré de ses idées radicales. Ils misent sur le fait que, légitimé, devenu l’acteur central du jeu politique depuis les élections législatives de novembre et confronté à la réalité du pouvoir, l’ancien trublion sera vite contraint de renoncer à ses diatribes contre les « élites », la « gauche amère » et les étrangers (musulmans en particulier).
Le pari est dangereux et Mark Rutte, le premier ministre libéral démissionnaire, y avait renoncé. En 2012, il avait expérimenté, dix-huit mois durant, la formule d’un gouvernement conservateur minoritaire soutenu, à la carte, par le populiste. Sa conclusion fut claire : « Plus jamais ça. » En 2002 déjà, son Parti populaire pour la liberté et la démocratie (VVD) avait tenté une alliance avec la Liste Pim Fortuyn, l’un des inspirateurs de M. Wilders. Elle n’avait duré que quatre-vingt-sept jours.
Dilan Yesilgöz-Zegerius, ministre de la justice démissionnaire, qui a succédé à M. Rutte à la tête de la formation libérale, n’a pas retenu sa leçon. En évoquant, en 2023, la possibilité d’une collaboration avec le dirigeant d’extrême droite, elle l’a légitimé. Insistant sur le thème de la migration, elle a achevé de convaincre une partie de l’électorat que le vote pour le PVV cessait d’être inutile et a favorisé le recul de son propre parti.
Même si elle a ensuite donné l’impression de s’y engager à reculons, la dirigeante libérale a conclu une longue négociation avec M. Wilders et son alliée Caroline van der Plas, du parti agrarien BBB. Six mois de discussions ont débouché, le 15 mai, sur un programme centré sur la migration, l’environnement, le rapport à l’Union européenne (UE) et une forte diminution de l’aide au développement.
Le quatrième parti de la future coalition, le Nouveau Contrat social (NSC), du dissident chrétien-démocrate Pieter Omtzigt, s’est, lui aussi, engagé prudemment dans l’aventure. Mais il a entériné son programme, apparemment satisfait d’avoir décroché la promesse, vague, d’un autre mode de gouvernance du pays, la garantie que la Constitution serait respectée et le « Nexit », longtemps prôné par Wilders, abandonné.
Pragmatisme (« Il faut résoudre les problèmes du pays »), volonté de respecter 23,5 % de l’électorat (le score aux législatives du PVV), mise au point d’un gouvernement « extraparlementaire » qui devrait laisser aux partis la possibilité de s’en distancier si nécessaire, garantie que M. Wilders ne conduirait pas lui-même la coalition : la droite et le centre droit ont justifié leur alliance inédite avec l’extrême droite par le souci de ne pas contribuer à l’essor de ses idées.
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